GvdB Table de matières Noms Mentionnés Camps Editie Nederlands |
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Les Enfants des
Partisans juifs de Belgique, Partisans armés Juifs, |
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Edité
par «Les
Enfants des Partisans juifs de Belgique», |
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Extraits: Témoignages de |
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Préface
Avertissement Note préliminaire 1) Les organisations citées fréquemment 2) Structure de l'Armée Belge des Partisans 3) Quelques Dates Le sort des Juifs pendant la guerre 40-45 1) Le Yshouv (communauté juive) se réorganise 2) L'escalade de la répression 3) Le combat armé Hommage
au martyre des Partisans Armés juifs Lettre de Maurice
Rozenewajg à sa famille Témoignage de
Bernard Fenerberg Liste des PA juifs cités et de leurs compagnons proches PA Extraits de presse |
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Ministre-Président de |
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Témoigner, c'est donner la mémoire à l'avenir. Les témoins ici sont des anciens Partisans Armés juifs, que leurs enfants interrogent ou qui racontent directement leur participation à la résistance contre «l'énorme machine nazie». La plupart d'entre eux sont fils ou filles de Juifs
polonais, arrivés en Belgique entre 1925 et 1930. Bien qu'élevés
religieusement, très vite ils militent, dans des organisations de
jeunes communistes, communisants ou socialistes, contre le fascisme.
Ils sont parmi les premiers à entrer, des 1941, dans Ce livre, qui se lit comme le plus poignant des romans, nous donne un aperçu assez complet sur les conditions de vie et de survie des Juifs de Belgique avant et pendant la guerre, sur l'organisation des Partisans Armés, mais il nous montre surtout que la communauté juive n'a pas subi passivement le génocide et que beaucoup de Juifs, dans notre pays occupé, ont combattu héroïquement. Nous revivons l'histoire quotidienne des hommes et des femmes menacés, arrêtés, déportés et parfois sauvés. Nous revivons la peur, l'oppression, la barbarie, mais aussi l'espoir, la solidarité, le combat pour la liberté, pour la dignité de tous les hommes. Nous ne pouvons qu'être reconnaissants au groupe d'enfants de Partisans juifs de Belgique qui a réalisé et publié cet ouvrage indispensable pour connaître, presque intimement, les pages d'une histoire qui nous concerne tous, aujourd'hui plus que jamais, car elles nous donnent une leçon de courage et de foi en l'Homme. Valmy Féaux Ministre-Président de |
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Préface |
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Que sait-on de la résistance juive à l'occupation nazie? Avec Hannah Arendt on a souvent reproché aux Juifs des pays occupés leur passivité devant les nazis. Après la guerre, comme par souci de justification, des historiens juifs mirent presque exclusivement l'accent sur la révolte du ghetto de Varsovie, donnant ainsi le sentiment que les soixante mille révoltés d'avril-mai 1943 avaient sauvé l'honneur perdu des six millions de Juifs qui se seraient laissé mener à l'abattoir. Dans un monde où depuis toujours la violence répond à la violence, où l'on chante les louanges de Bar-Kochba, Spartacus, Jeanne d'Arc, Garibaldi ou Koscuizko, seule la révolte armée pouvait être comprise et appréciée. Aussi a-t-on à peu près passé sous silence une forme de résistance que les Juifs ont développée à travers leur histoire et qui, pour être plus complexe et moins spectaculaire, commandée par leur éthique et imposée par leur situation de peuple dispersé, n'en fut pas moins efficace puisqu'elle leur aura permis de survivre à toutes les persécutions et à tous les exils. C'est une forme de résistance dont Bernanos, à la fois antisémite et admiratif, disait qu'elle consiste à tenir et à durer. Lorsque le 2 octobre 1940 le gouverneur nazi Ludwig Fischer décréta la création du ghetto à Varsovie, les Juifs entreprirent immédiatement d'organiser un prodigieux réseau d'entraide médicale, sociale et culturelle dans l'espoir de rendre moins pénible la vie de ces cinq cent mille hommes, femmes et enfants entassés dans un quartier de la ville, initialement prévu pour quatre-vingt mille habitants. Ghetto: périmètre d'une ville coupée du monde, sorte de léproserie dont les malades sont isolés en raison de leur appartenance au peuple juif. Cette idée est née un jour de l'an 1516, dans la cervelle d'un doge de Venise. A Varsovie, en 1940, le ghetto devint l'un des plus grands «cimetières de vivants», réserve pour un peuple condamné à disparaître. D'où la brusque «curiosité anthropologique» qui incita de nombreux Allemands à visiter le ghetto, dans un vaste mouvement touristique. Des soldats et des officiers munis d'appareils photographiques venaient, souvent en compagnie de leurs familles, voir vivre «les sous-hommes». Devant tant de cynisme et de bêtise, les Juifs ne se découragèrent pas. Ils entrèrent dans ce que j'appellerai la première phase de la résistance. Celle de la parole. On put voir des groupuscules de Juifs de langue allemande aller au devant de leurs bourreaux et leur parler. Peut-on imaginer la dose de courage et de dévouement nécessaire à pareil exercice? Opposer le verbe à la violence. C'était là leur calcul, leur espoir. Six mois plus tard, Himmler, par décret spécial, interdisait aux soldats allemands de pénétrer dans le ghetto et d'adresser la parole aux Juifs. Faute d'interlocuteurs, les Juifs passèrent à la seconde phase de la résistance: le témoignage. L'historien Emmanuel Ringelblum raconte dans son journal que malgré la faim qui les taraudait et bien qu'ils se sussent condamnés, ses compagnons de malheur trouvèrent assez de force pour s'employer à rassembler tous les documents qui circulaient dans le ghetto: ils les lui remettaient afin que l'histoire continue de s'écrire. Pour que le mal de l'histoire ne soit pas effacé par l'histoire. Celte détermination à rompre en silence le silence qui leur était imposé témoigne d'une rare audace et d'une non moins rare intelligence, d'une conscience aigue qu'avaient ces hommes et ces femmes de leur responsabilité face aux générations futures. Enfin, lorsque Emmanuel Ringelblum et ses collaborateurs, à qui l'on doit les fameuses archives — documentation irremplaçable sur la vie quotidienne du ghetto — furent déportés à leur tour, les Juifs encore vivants finirent par prendre les armes. Sans joie. Par manque de choix. B'eïn Breïra, comme on dit en hébreu. Montrant ainsi au monde, s'il en doutait, que, eux, les Juifs, étaient comme tous les hommes, également capables de tuer. La révolte du ghetto de Varsovie signait alors la troisième et dernière phase de la résistance juive contre les nazis. Cette résistance en trois paliers, le troisième n'intervenant que lorsque les deux autres eurent été épuisés, reste pour moi la plus prodigieuse, la plus bouleversante et la plus morale des leçons. Le ghetto de Varsovie demeure sans doute le plus éclatant symbole de la révolte juive armée contre le nazisme, mais il est avant tout le symbole de la résistance juive à l'oppression, à la persécution et à la mort, telle que des générations l'ont conçue et pratiquée tout au long des siècles. Et les Juifs en Belgique pendant ce temps-là? Que sait-on d'eux? Communauté d'environ soixante-dix mille membres, elle est composée pour la plupart d'émigrés venus d'Europe Centrale. Ouvriers, petits commerçants, artisans, tous politiquement engagés: sionistes ou communistes, ils vivent à Anvers ou à Bruxelles ou encore dispersés à travers le pays. C'est donc une toute petite communauté comparée à celle de Pologne qui compte alors trois millions cinq cent mille âmes. Pendant l'Occupation, sa situation est aussi quelque peu différente de celle des communautés juives de l'Est. Ce n'est qu'en mai 1942, date à laquelle la moitié de la population du ghetto de Varsovie a déjà disparu dans les camps de la mort, que les nazis imposent aux Juifs belges le port de l'étoile jaune. Le 3 septembre 1942, c'est la grande rafle: des trains et des camions bourrés de marchandise humaine quittent Malines, centre de rassemblement des Juifs qu'on envoie à la mort. En deux ans, plus de vingt-six mille personnes, plus d'un tiers de la communauté, sont ainsi déportées qui ne reviendront jamais. La lutte des Juifs au sein du Front de l'Indépendance, principal mouvement de résistance belge, qui réunissait aussi bien les Juifs que les Chrétiens, prend alors une forme particulière. Le Comité de Défense juive est créé. La majorité de ses militants sont des Juifs de langue yiddish. Ils publient deux journaux clandestins : Unzer Wort (Notre Parole) et Unzer Kamf (Notre Combat). Le premier est sioniste-travailliste, le second communiste. Ce comité prend aussitôt en charge la fabrication de faux papiers, l'entraide sociale, l'éducation et le sauvetage des enfants... C'est aussi grâce à ce comité, qui a su mobiliser une partie de la population belge, que de nombreux Juifs ont pu se cacher et attendre la fin de la guerre. Jusqu'en 1944, les combattants juifs formaient la majorité des effectifs de la résistance de la ville de Bruxelles. Quarante-huit ans plus tard, à l'occasion de la parution de mon livre Les Fils d'Abraham, je rencontre une délégation des enfants de ces résistants juifs. Ce sont des hommes et des femmes d'âge mûr, parents à leur tour. Et c'est à la demande de leurs propres enfants qu'ils ont décidé d'enregistrer aujourd'hui les témoignages des survivants: de vieux Juifs qui jusque là avaient refusé de parler par modestie et par égard pour les morts. A la lecture de leurs textes, je découvre peu à peu le milieu juif d'Anvers et de Bruxelles avant la guerre, la vie quotidienne sous l'Occupation et les liens qui unissaient Juifs et non Juifs. Et ce courage simple qui consiste à dire non en un temps où ce mot de trois lettres signifiait: mort. Quand Joseph Hacohen, un médecin juif d'Avignon,
achève en 1575 la rédaction de «Afin que tu racontes aux oreilles de ton fils et de ton petit-fils»: voilà pourquoi je crois à ce livre. A son utilité, à sa valeur historique. Voilà pourquoi je suis honoré d'associer mon nom à ce bouleversant ouvrage. |
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La guerre 40-45 représente un moment historique
exceptionnel qui impressionne aussi les générations les plus jeunes.
Si le génocide des Juifs a été largement popularisé, il reste encore
à en finir avec le préjugé selon lequel les Juifs auraient été
passifs. Peu de gens savent que de nombreux Juifs des milieux populaires
ont été parmi les tout premiers à entrer dans Qui étaient-ils? Comment en sont-ils venus à se comporter en héros et à gripper l'énorme machine nazie? Comment apprécient-ils leur action? Plusieurs enfants de P.A. (Partisans Armés) se sont posé ces questions afin de comprendre les événements historiques qui les ont marqués. Mais ils n'ont trouvé de réponse ni dans les documents d'époque — cela va de soi vu la période troublée et les conditions de l'illégalité — ni dans les documents actuels. Et comme les P.A. eux-mêmes ressentaient ces manques, ils étaient disposés à parler de leur expérience, à rétablir une vérité trop souvent déformée. Petit à petit, au fil des témoignages s'est dessiné tout un milieu juif d'Anvers et de Bruxelles dont les éléments les plus décidés choisirent le chemin éminemment périlleux de la lutte armée. Cette approche de l'Histoire — cela ne peut être
qu'une approche — est vivante, réelle parce que ces témoins-là n'ont
que leur modestie à surmonter pour raconter ce qu'ils ont vécu. D'autres
témoins de l'époque qui ont laissé plus de traces écrites (de L'ensemble des témoignages apporte tellement de facettes passionnantes et instructives sur les jeunes, sur les femmes, sur les liens entre Juifs et non Juifs sur le courage et l'ingéniosité des partisans, etc. , qu'un public plus étendu pourra certainement en tirer profit. La résurgence du fascisme les rend encore plus actuels. Pour que les lecteurs puissent mieux se familiariser avec la mentalité, les motivations, les attitudes des partisans, les témoignages spontanés ont été transcrits scrupuleusement, ils n'ont été que légèrement aménagés pour rendre leur lecture plus aisée. Et si quelques détails manquent, si l'oubli fait parfois son oeuvre, il n'en reste pas moins vrai que la personnalité de chaque P.A. a traversé les années et apparaît avec une netteté frappante. En dehors de témoignages recueillis précédemment et de ceux écrits par les intéressés eux-mêmes, tous les autres ont été pris par des enfants de P.A. Les témoins assument la responsabilité de leurs propos. L'ouvrage est publié à l'initiative des «Enfants des P.A. Juifs de Belgique». |
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1) Les organisations citées fréquemment |
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a) Les organisations de jeunes: - proches des communistes : JASK (club sportif ouvrier juif) à
Anvers,
DYSK (cercle sportif juif démocratique) à Charleroi ; Ainheil (Unité)
à
Bruxelles; après-guerre; USJJ (Union sportive des jeunes Juifs); JC
(Jeunesse - proches des socialistes: JS (Jeunesse socialiste), Faucons rouges; sioniste: Dror, Hashomer Hatzaïr; - Maccabi : club sportif. b) Partis et organisations: - Poale Sion (sioniste de gauche); |
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2) Structure de l'armée Belge des partisans |
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- trois hommes forment un détachement dirigé par le chef du
détachement
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- 10 mai 1940: agression allemande, exode de la
population belge; |
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Le sort des juifs pendant la guerre 40-45 |
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Lors de la brutale invasion allemande, le 10 mai 1940, la communauté juive de Belgique comptait environ septante mille âmes: quarante cinq mille à Anvers, vingt mille à Bruxelles, deux mille à Liège et à Charleroi, et le reste dans des villes de moindre importance. La majorité de cette communauté était composée d'immigrés, venus des pays d'Europe orientale. Grâce à leur dynamisme et à leur esprit d'initiative, ils avaient trouvé leur place dans le pays. Ouvriers, petits commerçants, artisans, ils formaient la classe laborieuse juive de Belgique. Dès les premiers jours de l'offensive allemande,
toutes les routes menant en France étaient envahies par des colonnes de réfugiés,
alors que déjà la panique s'emparait de la population juive. En quelques
jours seulement, Les Juifs qui avaient réussi à gagner le sud de Au début d'août Entre-temps, les nouvelles parvenues de Belgique rapportaient que la vie tendait à reprendre son cours normal. Malgré les retours, la communauté juive de Belgique
se réduisit à soixante mille âmes; une partie des réfugiés s'installèrent,
tant bien que mal, dans le sud de l) Le yshouv (Communauté juive) se réorganise Sous l'impulsion de H. Rodkel (déporté plus tard par les Allemands pour «rébellion» contre le Judenrat), les rouages du Conseil de la communauté juive recommencèrent à tourner; il était alors le seul organisme légal représentatif de la communauté et son service social Ezraë reprit son activité légale. Mais les autorités allemandes ne lui faisaient pas
confiance et il dut très vite céder la place au «Judenrat» A J.B.
(Association des Juifs en Belgique) nommé par La première ordonnance est édictée en octobre 40.
Elle donne la définition «scientifique» de la question si actuelle pour
les Juifs: qui est juif? Réponse: est juif toute personne issue d'au
moins trois grands-parents de race juive. Il est ordonné aux personnes répondant
à cette définition de se présenter à Une deuxième ordonnance portant la même date interdit aux Juifs les services publics, la presse, la radio, l'enseignement et le barreau des avocats. Le 31 mai 1941, nouvelle ordonnance antijuive, économique cette fois: les firmes et magasins juifs doivent inscrire sur leur façade la mention «Entreprise juive». Leurs propriétaires sont également tenus de déposer leur capital et d'ouvrir un compte dans une banque spéciale. Désormais, les entreprises juives pourront être gérées par des «commissaires aryens». Le 29 août 1941, une ordonnance interdit aux Juifs de quitter leur domicile entre 20 H et 7 H du matin. De plus, ils devront habiter exclusivement dans l'une des quatre villes principales du pays: Bruxelles, Anvers, Liège ou Charleroi. En décembre 1941, les enfants juifs sont interdits d'accès aux écoles publiques, à tous les niveaux. Durant la fête de Pâques 41, les deux plus grandes synagogues d'Anvers sont incendiées par des nazis flamands commandés par des officiers SS. Ce n'est que deux heures plus tard que les pompiers de la ville sont autorisés à éteindre le feu. Ces actes de vandalisme bouleversèrent les habitants d'Anvers et suscitèrent leur indignation. Une première étape des persécutions allemandes contre les Juifs sera bouclée avec l'ordre de mai 1942 de porter l'étoile jaune sur la poitrine, avec la lettre «J» en noir sur fond jaune. En juin 1942, une ordonnance interdit aux médecins et dentistes juifs ainsi qu'aux autres professions assimilées, de pratiquer leur art.
Au début, il était possible de se débrouiller avec les commissaires
aryens chargés de la gestion des entreprises. Les enfants juifs fréquentaient
maintenant des écoles juives, ouvertes par le «Judenrat». On avait créé
aussi des institutions d'entraide médicale, des cabinets dentaires, des
laboratoires, etc. On s'était même habitué a l'interdiction de sortir
dans la rue après une certaine heure — interdit que les résistants
juifs bravaient pour aller coller des affiches et papillons, distribuer
des tracts dans les boîtes aux lettres et réaliser d'autres actions
clandestines. Il y avait ceux qui espéraient échapper à la déportation
en travaillant dans l'agriculture, les charbonnages, la sidérurgie, etc.
Il y avait aussi la poignée de Juifs qui brassaient des affaires prospères
de gilets de fourrure, pelisses et autres pour l'armée allemande et
contre lesquels Les deux organes de presse, «Unzer Wort» du Poale Sion et «Unzer Kampf» du Parti Communiste, exposent, chacun à leur façon, les objectifs et la signification des ordonnances antijuives et appellent la population juive à ne contribuer d'aucune manière à l'effort de guerre allemand. Plus tard, ils inciteront leurs lecteurs a lutter contre le «Judenrat». Le principal Mouvement de Résistance, le «Front de l'Indépendance», formait un éventail de toutes les tendances, depuis les communistes jusqu'aux catholiques. Parmi les membres de la direction du F.I., siégeait également un intellectuel juif communiste, Joseph Jospa, qui fut chargé de créer un «Comité de Défense des Juifs» dans le cadre du F.I. Au sein du C.D.J. siégeaient Abusz Werber du Poale Sion de gauche, Israël Mandelbaum et Icek (Richard) Wolman de «Solidarité juive». De nombreuses personnalités influentes le rejoignirent, telles que le professeur Perelman, le professeur Flam, Benjamin Nykerk (un des chefs de file du sionisme en Belgique avant la guerre), Heiber, Fordman, Van Praag, Bolle et d'autres encore. Rodkel, secrétaire de la «Communauté Israélite de Bruxelles», connu de lotis pour son profond humanisme, se joignit également au C.D J. D'autres Comités de Résistance juifs furent créés dans les autres grandes villes du pays. A Liège: Albert Wolf (un imprimeur qui mettra son matériel à la disposition du Comité), l'ingénieur Fehlol, Steinberg et d'autres encore. A Anvers: Flam, Manaster. A Charleroi: Boyarski, Katz, Broder, Istinne et quelques autres. Dans un premier temps, il a fallu obtenir l'appui de la population belge. Sans ce lien, l'action commune eut été difficile voire impossible à organiser. Plus tard, il fallut mettre sur pied une série de sections telles que: la fabrication de faux papiers; les finances; la propagande et la presse; l'entraide sociale; et surtout celle chargée du sauvetage des enfante. C'est grâce à l'aide, effective de Dès août 1942, les premiers transports quittent Malines, lieu de rassemblement des Juifs voués à la déportation. En deux ans, plus de vingt six mille Juifs seront envoyés dans les camps de la mort dont ne reviendront, faméliques, que mille quatre cents environ. Le 3 septembre 1942 s'est produite une rafle de grande envergure dans les deux quartiers juifs de Bruxelles: Saint-Gilles et Anderlecht. Comme la plupart des Juifs ne répondaient plus aux
convocations, A partir de ce jour, les Allemands se livrèrent systématiquement à la chasse aux Juifs, aidés par des mouchards qui indiquaient les endroits où ils se cachaient ou montraient, dans la rue, tout passant à l'aspect juif. La chasse aux mouchards, parmi lesquels des Juifs eux-mêmes, devint un des objectifs des partisans. Le premier groupe de partisans issu des organisations juives progressistes naquit fin 1941. Sa première mission consiste en des actes de sabotage dans les manufactures juives travaillant pour l'armée allemande. Mais bien vite, il élargit son champ d'action tout en augmentant ses effectifs. Parmi eux, on trouve Weichmann, Maurice Rozencwajg, Leib Rabinowicz, Rakower, Potasznik et quelques autres qui seront fusillés. Parallèlement, d'autres partisans juifs s'intègrent directement dans des groupes avec des non Juifs. Parmi eux, Mozes Lando, Helfgott, Schive, Livschitz, Dobrzynski et quelques autres qui furent également exécutés par les nazis. Tous ces groupes appartenaient à l'Armée Belge des Partisans, branche «militaire» du F.I. Jusqu'en 1944, les combattants juifs formaient la
majorité des effectifs des P.A. de Bruxelles et se distinguaient également
dans d'autres régions du pays. On peut estimer à cent cinquante le
nombre de Juifs qui ont pris une part active à (cette partie a été composée à partir de «Quelques
bonnes feuilles de |
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(1)
pour toute la structure, le chiffre trois n'est pas strict. |
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Hommage au Martyre des partisans armées juives | ||||
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CYMBERKNOPF, Abraham (*) Né le 27 septembre 1922,
abattu par l'ennemi fin 43. De nationalité polonaise, il fit partie
du groupe commandé par Paul Halter et il participa a de nombreuses
actions comme l'attaque d'un garage fasciste, chaussée de Waterloo. |
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(*) Nous n'avons pu recueillir les documents photographiques | ||||
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(•) Nous n'avons pu recueillir les documents photographiques | ||||
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Rachel Coperbac |
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R. -Je suis née dans la capitale de la Bessarabie, à Kichinev (Roumanie) en 1908. Mon père est décédé quand j'avais trois ans et ma mère a dû élever seule ses quatre enfants. Nous avons vécu des moments très difficiles. Mais ma mère était très courageuse, elle a fait tout son possible pour nous procurer le nécessaire. Q. - Dans quel travail s'est-elle engagée? R. - Elle a commencé par de la couture à domicile. Ce n'était pas suffisant. Alors, elle a tenu une échoppe au marché pour vendre des vêtements. Ça a duré jusqu'à ce que mon deuxième frère puisse travailler. Avec son petit salaire, il a aidé la famille à subsister. Mon frère aîné, lui, a été remarqué pour ses capacités intellectuelles et on lui a donné les moyens d'étudier, grâce à l'intervention de professeurs. Pour ses études supérieures, il est parti à Paris où il devait travailler pour se tirer d'affaire; il avait très dur. Il s'est intégré dans un groupe d'étudiants qui est allé en Union Soviétique pour accomplir le service militaire et avoir ainsi le droit de terminer les études gratuitement; étant bessarabien, il en avait la possibilité. Il est devenu ingénieur des Ponts et Chaussées; il s'est spécialisé dans les métaux et la conception des machines. Il est mort à soixante-quatre ans. Ma mère était croyante. Sans doute que mon père l'était aussi. Mais ma mère avait un esprit très ouvert, elle était fort courageuse et pleine de bon sens. Q. - Et toi, comment as-tu évolué? R. - Au départ, j'étais influencée par ma mère et ensuite, par mon frère aîné. Par des discussions avec lui, petit à petit, je me suis libérée de la religion; D'ailleurs, ma mère n'était pas fanatique, elle ne courait pas à la synagogue, elle respectait seulement les grandes fêtes de Nouvel An ou de Yom Kippour. Q.- Ton frère âiné était-il communiste? R.- Il à été emprisonné en tant que communiste. Toute la famille s'est rapprochée de la gauche. Q.- As tu fréquenté longtemps l'école? R.- Comme nous étions démunis d'argent, je devais beaucoup aider ma mère. Je n'ai donc pas fréquenté l'école régulièrement et je n'ai pas termine le premier cycle. A quatorze ans, j'ai travaillé dans la maison de couture la plus connue de ma ville natale. La patronne se rendait à Paris deux ou trois fois l'an pour prendre des nouvelles de la mode. J'y étais fort exploitée parce qu'on m'appelait sans arrêt pour d'autres tâches qui retardaient mon apprentissage. J y ressentais énormément d'injustices. A un moment donné, nous avons décidé entre nous de faire grève - la grève n'était pas encore autorisée. Je me faisais déjà remarquer. Q. - Et qu'a donné la grève? R. - D'après ce que je me rappelle - j'étais très jeune - elle n'a pas duré longtemps et je n'ai pas l'impression qu'on a gagné quelque chose. Q. - Tu travaillais dans la communauté juive? R. - Oui, mais nous parlions le russe entre nous. Q. - La communauté juive était-elle importante dans ta ville? R. - Oui, il y avait beaucoup de Juifs. Notre famille n'était pas particulièrement liée avec les Juifs, nous avions aussi des camarades non juifs. Q. - As-tu souffert de l'antisémitisme ? R. - J'étais trop jeune mais ma mère me racontait les pogroms où on massacrait, torturait des Juifs et ces récits sont restés gravés dans ma mémoire. Q. - Qu'es-tu devenue après la grève? R. - Je suis encore restée dans cette maison de coulure pendant quelques années. Peu de temps après, des communistes qui avaient été emprisonnés plusieurs années ont été libérés. Comme nous étions actifs dans le Secours Rouge, nous avons organisé dans notre maison une rencontre avec eux pour connaître les conditions de vie dans les prisons. Nous avons passé une soirée ensemble jusque tres lard dans la nuit. Mais un voisin a dénoncé cette rencontre. Suite à cela, j'ai été convoquée à la «Sûreté». Ils m'ont accusée d'avoir reçu des communistes. J'ai nié. Dès que j'avais reçu la convocation, j'avais demandé à la maison qu'on fasse disparaîtrc toute trace de nos rapports avec les communistes. Ils m'ont retenue, arrêtée et mise dans la cave; j'ai été interrogée jour et nuit. L'un prétendait détenir des preuves et me menaçait de prison ferme si je ne parlais pas. J' ai nié pendant près d'un mois. Q.- Les prisonniers que vous aviez reçus étaient-ils des évadés ? R.-
Non, i1s avaient été libérés après huit à dix ans de
prison R.- Ils avaient été arrêtés comme communistes et dès lors, c'était une infraction grave de les recevoir: j'étais passible d'être accusée de communiste. C'est pourquoi, j'ai toujours prétendu que je dormais, que personne n'était venu à la maison. Nous habitions au sous-sol, et un officier qui habitait à l'étage a sans doute aperçu de la lumière chez nous en rentrant; personne d'autre que lui ne pouvait nous dénoncer. Un jour, vers neuf heures du matin, j'ai été appelée et l'interrogatoire a repris dans une grande salle comprenant plusieurs bureaux. J'ai élevé très fort la voix pour me disculper. J'ai aussi dénoncé à voix haute le fait qu'on ne permettait pas à ma mère de m'apporter des colis, j'étais révoltée par le traitement qu'ils m'infligeaient alors qu'ils n'avaient aucune preuve de ma culpabilité. Tous les employés présents ont assisté à mon éclat Ils étaient nombreux à m'écouter clamer mon innocence. J'ai même crié: «Si jamais j'apprenais que ma mère a payé pour me libérer, je dénoncerais le coupable!». Et c'était vrai, ma mère avait emprunte de l'argent pour me sortir de prison. Le soir même, j'étais libérée. Après ma libération, la vie est devenue impossible. J'avais sans cesse des suiveurs à mes trousses, aussi bien pour me rendre à mon travail que pour revenir à la maison. Ça pesait sur nous de plus en plus. Ma mère vivait dans l'inquiétude, moi aussi. L'idée de partir s'imposait progressivement. Je recevais des lettres de Belgique envoyées par des amis qui étudiaient dans ce pays. Un de ceux-ci m'écrivait très souvent en me priant de le rejoindre. Personnellement, je n'avais pas les moyens d'entreprendre le voyage, ma mère non plus ne disposait pas de l'argent nécessaire. Je ne me décidais pas, je me demandais comment la famille subsisterait sans mon aide. En fin de compte, c'est encore ma mère qui a pris la décision. Elle voyait que mon avenir était bouché: aucune formation, pas d'études, pas de perfectionnement dans mon métier, tout le temps surveillée; elle a alors tranché: «Il vaut peut-être mieux que tu partes». Il m'a fallu beaucoup de temps pour me décider à venir en Belgique. Je suis arrivée à Anvers en 1929 à un moment où le travail se faisait rare. Une amie a réussi finalement à m'en trouver et à peine installée, j'ai été engagée dans une usine qui fabriquait des sous-vêtements. J'y suis restée quelque temps. A la suite de mon absence le Premier Mai à mon travail, j'ai été licenciée. J'ai travaillé ensuite
dans une entreprise de tricot (« Plus lard, nous avons habité Bruxelles et nous nous sommes séparés. Puis, j'ai rencontré Chaïm Abel et j'ai vécu avec lui jusqu'à son arrestation en 43. Q. — Où étais-tu à la fin des années 30? R. — Nous habitions ensemble et j'avais mon enfant à la maison. Chaïm avait une bonne situation, il était ingénieur mécanicien dans les Etablissements Wanson (construction de matériel thermique). Nous avions convenu que je recevrais une formation dans une maison de couture, afin d'être parée au pire. Mais au début de la guerre, j'ai dû arrêter et Chaïm, de son côté, ne pouvait plus se rendre dans les bureaux de son entreprise, il exécutait pour elle des travaux à l'extérieur, dans d'autres usines (à partir de février 43). Nous étions domiciliés à Schaerbeek et tous les jours sans exception, nous étions sur la brèche avec des copains pour distribuer des tracts, vendre des journaux, etc. Q.- Tu étais organisée dans le Parti Communiste? R. - Dans la cellule de Schaerbeek avec des Belges. Q.- Comment l'es-tu
engagée dans R.- Quand la guerre a éclaté, il a fallu assurer la sauvegarde des enfants. Des que nous avons appris que les Allemands poursuivaient aussi les enfants, nous avons confié ma fille Véra à une famille belge qui s'est proposée pour la prendre en charge et la protéger. Nous étions déjà dans l'illégalité. Chaïm faisait partie des P.A. La situation de mon
enfant m'avait fait prendre conscience de celle de tous les autres enfants
juifs. Je me suis occupée d'eux au sein de Au bout d'un an, un membre de l'Etat-Major me rencontra pour me demander d'entrer aux P.A. J'ai accepté. Q. - Pourquoi avais-tu eu envie d'entrer aux P.A.? R. - J'avais l'impression que j'agirais plus directement contre l'ennemi. C'était très important pour moi. Q. - L'action armée te paraissait plus offensive? R. - Oui, absolument. On m'a proposé d'adhérer aux P.A. presqu'au moment où je pensais formuler ma demande. J'ai été interrogée par un membre de la direction qui voulait savoir si j'étais apte, si je résisterais à la torture, etc. Avant d'entrer effectivement chez les Partisans, j'ai encore un peu continué à m'occuper des enfants à cause des contacts que j'avais établis. J'ai été admise aux P.A. tout de suite après l'arrestation de Chaïm qui eut lieu le 12 juillet 1943. Q. - Chaïm te parlail-il de son activité de Partisan? (1) R. - Il régnait une
confiance entre nous. Il m'a raconté certaines choses. Chaïm a été arrêté
avec des documents sur lui rue Royale, à proximité de l'entreprise pour
laquelle il travaillait; un collègue roumain qui sortait du bâtiment par
hasard a également été arrêté. Ils ont été conduits à Quand
Chaïm fut à Malines,
j'ai essayé de lui transmettre des instruments pour qu'il s'évade du
train qui devait le convoyer dans un camp de concentration. Une charrette
qu'on chargeait de sable dans un hangar était régulièrement amenée à Malines
par un SS et par Wulf
Epsztejn qui m'a indiqué où placer les instruments dans
le sable. Nous avons rassemblé tout le matériel qu'il avait demandé ci
je me suis rendue là-bas avec un copain de Schaerbeek. Nous faisions
semblant d'être des amoureux. Lorsque le SS s'est dirigé du côté opposé,
je me suis précipitée pour cacher les instruments. Malheureusement,
les Allemands ont renforcé la garde des trains de déportation, des
soldats en armes se trouvaient en permanence sur les toits, on ne pouvait
rien tenter. Cette action n'a donc servi à rien. Comme
Chaïm connaissait plusieurs langues,
il aurait pu rester à Malines mais il
a refusé parce que, a-t-il dit, «ma conscience ne me permet pas de
rester ici quand mes camarades vont partir». J'ai appris tout cela par un prisonnier qui sortait régulièrement pour faire des courses et qui en profitait pour déposer des messages. Q.
- Quelles étaient les tâches dans les Partisans? R.
— J'ai été désignée dans le secteur 05. Je voyageais comme courrier
à Liège, Namur, Bruxelles et les environs. Tout
à fait libérée de mon travail avec les enfants, j'ai d'abord eu des
contacts, en août-septembre 43, avec un ancien sénateur et ensuite, j'ai
été la courrière de Baligand
(de l'Etat-Major national) jusqu'à mon arrestation le 13 avril 44. Le
plus souvent, j'apportais des plans de travail qu'un autre courrier me
remettait. Les instructions étaient écrites en clair et il fallait donc
les cacher soigneusement. Une
anecdote pour expliquer cela. Un jour je suis allée à Liège où
j'ai reçu un document à ramener à Bruxelles; je me suis rendue dans un
magasin de nourriture pour oiseaux pour acheter une grande boîte de
graines. Dans un café, j'ai mis le document dans la boîte que j'ai
ensuite refermée avec de la colle ; l'opération a mis d'ailleurs
tellement de temps que la serveuse est venue voir ce que je fabriquais. J'ai
pris le train. En cours de voyage, des Feldgendarmes me contrôlent, ils
prennent le paquet, le secouent, et d'énervement, ils le jettent sur la
tablette, de la farine se répand dans tout le compartiment mais la boîte
ne s'ouvre toujours pas! Ils s'en vont mais on imagine dans quel état je
me trouvais. Arrivée à Bruxelles, je prends le tram 5, nouveau contrôle
de Feldgendarmes, et même histoire, le paquet ne s'ouvre pas, le
Feldgendarme jure «Schweinhund,...!» C'est une aventure parmi beaucoup
d'autres. J'étais tout le temps en route car Baligand était continuellement sur la brèche. Le voyage à Liège me permettait d'avoir d'autres contacts. Q.
- Pendant cette période, comment étais-tu logée? R.- Après l'arrestation de Chaïm, j'ai été mal nourrie, trimbalée de gauche à droite. J'ai quand même continué mon activité. J'ai procuré des logements à des camarades mais moi-même j'en ai manqué parfois. Une nuit, je n'ai pas vu d'autre solution que de dormir dans le parc de St-Josse, près du square Marie-Louise; le vieux gardien s'est approché de moi et m'a demandé gentiment de m'en aller parce qui si on m'apercevait, je serais arrêtée et lui risquait d'être fusillé. Je me suis rappelée que près de là, logeait une famille dont j'avais placé un ou deux enfants. Je suis allée sonner chez eux, il était tard; le concierge a ouvert la porte et en me voyant a crié derrière lui: «Ce n'est rien, vous pouvez monter». Le couple est sorti de la cave, ils avaient l'air de morts-vivants tellement ils avaient été effrayés par le coup de sonnette. J'ai passé la nuit chez eux mais je me suis dit que je ne recommencerais jamais. J'ai logé ensuite avec deux autres personnes. Je leur avais dit de quitter le logement si j'étais arrêtée mais ils ne l'ont pas fait. Q. - Où se trouvait ta fille Véra? R. - Au début, Véra habitait chez des amis de St-Josse dans une maison où Chaïm et moi avons logé. Quand Chaïm a été arrêté, il m'a fait remettre un message où il s'inquiétait pour Véra parce qu'elle était trop connue dans le quartier. Je l'ai alors placée dans un couvent à Kortenberg. Pour ces gens, c'était un drame car ils la considéraient comme leur fille, et lorsque j'ai été arrêtée, ils l'ont reprise à nouveau jusqu'à ce que je vienne la rechercher à ma libération. Q. Comment as-tu été arrêtée? R. — Je rencontrais souvent une responsable de l'intendance qui, avant d'entrer chez les Partisans, avait assuré qu'elle tiendrait le coup sous la torture; moi, j'avais été moins affirmative à mon sujet, pour rien au monde, on ne peut garantir; on a eu des cas de gens qui ont été torturés mortellement et qui en fin de compte ont quand même parlé. C'est cette responsable de l'intendance qui m'a donnée. Depuis, je lui ai pardonné pour la bonne raison qu'elle m'a expliqué que son père et son fiancé avaient été fusillés comme Partisans et qu'elle était restée seul soutien de sa mère. Moi, qui ai beaucoup encaissé et beaucoup supporté, je ne voulais cependant pas qu'on sévisse contre ceux qui n'avaient pas tenu le coup, nous n'avions pas été élevés en héros. Comme Baligand
était un homme exceptionnel, il était activement recherché et sa tète
était mise à prix sur des affiches. Quand j'ai été arrêtée,
le 13 avril 1944, Puis, je suis restée seule dans une cave pendant plusieurs jours, j'ignore toujours où elle se situait. J'ai été ramenée à Ensuite, je suis restée deux mois à Malines. La voisine de mon cachot, une Flamande, Elsa De Cracker, s'est comportée en héroïne, les tortures l'ont rendue sourde mais elle n'a jamais fourni de renseignements. A huit, nous avons été envoyées à la prison de St-Gilles pour une quinzaine de jours. Comme il n'y avait plus d'interrogatoire, cet endroit me paraissait être le paradis. Nous avons été déportées à Ravensbrück. D'abord, nous avons été placées en quarantaine, et ensuite, les éléments les plus jeunes ont été choisis pour travailler dans une usine de Siemens et d'autres du même genre. Je devais partir travailler dans un camp annexe à Neu-Brandeburg mais à l'appel, après qu'on m'a choisie avec Rachel Luftig, je suis tombée évanouie par terre; j'avais la scarlatine. Une doctoresse tchécoslovaque qui avait été renseignée sur mon compte m'a soignée avec dévouement et je m'en suis sortie grâce à elle. En octobre, tout le groupe de camarades a été accepté chez Siemens où je me suis aussi retrouvée. Mais j'étais vidée, épuisée par la scarlatine, l'érésipèle (cuisse gonflée, fièvre) et les mauvais traitements. Je ne parvenais pas à faire le nombre de pièces requis et du coup, j'ai été accusée de «saboter le travail». Il fallait manipuler de petites bobines pour l'aviation avec une grande précision, mais à cause de mon état de faiblesse, je voyais deux bobines au lieu d'une et je gâchais l'ouvrage ! Apres un contrôle, j'ai été mise à la porte. Heureusement, une
responsable tchécoslovaque, une communiste, a défendu ma cause et j'ai
été déplacée. J'ai travaillé avec une Russe jusqu'à J'ai été libérée le
23 avril 1945 par Nous sommes arrivées
au Danemark et puis à Malmö. En Suéde, nous avons été bien reçues et
bien installées. Mais au bout de trois ou quatre jours, j'ai attrapé le
typhus et j'ai été transportée a l'hôpital pour deux mois. A deux
reprises, on a annoncé que j'étais morte. En sortant du coma, j'ai
ouvert les yeux et j'ai vu Q. - Comment s'est passé le retour? R. — C'était la continuation du cauchemar car je rentrais sans rien, ni santé ni sous, rien. A cette époque, j'ai été transbahutée de droite à gauche, j'étais trop faible; je suis même restée trois semaines dans un château de Solvay pour me remettre en état, c'était insuffisant, il m'aurait fallu plus de temps. Véra est d'abord allée dans une colonie de Solidarité Juive et ensuite, elle est partie six mois en Suède dans une famille d'accueil avec la fille d'une prisonnière politique d'Anvers. Pendant cette période, j'ai réussi à faire pas mal de choses. Un copain m'a proposé un petit appartement et j'ai aménagé mon foyer. J'ai fréquenté une école de coupe et de couture et l'année suivante, j'ai été engagée dans une grande maison de confection appartenant à un patron démocrate qui m'a directement envoyée dans un secteur où les ouvriers m'ont aidée à m'intégrer. J'ai pris du temps pour apprendre le métier mais j'étais bien considérée; je suis restée vingt ans dans cet établissement. Véra était aux études, on se téléphonait à midi et on se voyait le soir, entre mes activités syndicales — j'étais déléguée — et mes autres activités. Progressivement après Q. - Comment juges-tu la période de la guerre, après coup? R. — Enrichissante à un point extraordinaire, ce fut une école de la misère et une analyse de soi-même. A aucun moment, je ne me suis vue «donner» quelqu'un. Si je n'étais pas passée par cette école, je n'aurais jamais eu cette conscience, cette force morale. J'ai tenu le coup. Il manque encore beaucoup de choses dans mon témoignage: ma vie avec Chaïm, mes rêves lorsque j'avais le typhus, le souvenir de celles qui sont mortes à côté de moi en Suède quand j'étais à l'hôpital, etc. (1)
Chaïm Abel a été l'adjoint de Jacob
Gutfrajnd à la direction du corps mobile. |
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Je suis née à Radom en Pologne, le 5 mars 1917, dans une famille de commerçants fort religieuse. J'ai terminé l'école publique à quatorze ans. J'ai suivi des cours du soir après la guerre. A quinze ans, j'étais apprentie couturière. Aussi, je me suis affiliée aux Jeunesses Communistes. Comme j'étais très active comme courrière, la police me recherchait. Il était temps de me sauver. Je suis partie illégalement en France où j'ai vécu deux ans de 1936 à 1938. Ensuite, j'ai été expulsée et je suis arrivée en Belgique également en fraude. En juin 1939, j'ai épousé Leibke Rabinowicz. Après avoir été mise en contact avec le Parti Communiste, je me suis occupée d'enfants. Le 10 mai 1940, la
guerre éclatait en Belgique, nous sommes partis dans le midi de Le travail avec le Parti a commencé: distribution de journaux, réunions, tout clandestinement. Fin 41, Leibke devenait membre des Partisans, recruté par Jacob Gutfrajnd; moi, j'étais enceinte d'une fille qui est née le 3 mai 1942. J'ai poursuivi le travail illégal en ayant toujours près de moi l'enfant dans sa voiture. Quand les Allemands se sont attaqués aux Juifs, il a fallu cacher l'enfant. Après beaucoup de recherches, nous avons trouvé une famille belge qui a accepté de s'occuper d'elle. Elle n'avait que trois mois. Nous, nous sommes allés vivre avec des copains belges, Partisans aussi. Leibke a continué d'être actif chez les Partisans et moi, de placer des enfants juifs chez des familles belges, dans le Front de l'Indépendance. Entretemps, j'ai aussi aidé Leibke à transporter des armes et du matériel. Je n'oublierai jamais
sa première action. Il a abattu un Allemand de Tout de suite après sa mort, je me suis engagée dans l'Armée Belge des Partisans, au service des renseignements. Pendant quelques semaines, j'ai filé des traîtres, des collaborateurs, etc. Le 4 juin 1943, Sarah
Goldberg, Henri
Wajnberg et moi étions arrêtés ensemble par A Malines, nous avons formé des groupes avec de nouveaux arrivés. Sara Gutfrajnd, Dora Rabinowicz, Abel Milnowiccky, Max Wulfowicz, Léon Waksman et d'autres. Nous avons aussi eu un contact avec Giza Weissblum qui sortait du cachot. Elle était dans un état horrible. Elle avait été battue par les gestapistes, la figure et les mains étaient toutes déformées. Elle n'était plus capable de se laver ni de se nourrir, nous l'avons aidée le mieux possible. Nous étions prêts à sauter du train qui nous transportait en déportation, ayant reçu de l'aide de l'extérieur. Hélas, après le XXème convoi, les Allemands étaient mieux préparés. Pas moyen de bouger, ils étaient partout. Apres un long voyage dans les wagons à bestiaux, nous sommes arrivés enfin au «paradis» d'Auschwitz. Il est inutile de rappeler les conditions du camp. Par hasard, Giza a reconnu sa cousine Mala Zimetbaum, grâce à qui nous sommes encore en vie. Il est difficile de décrire les sacrifices de Giza dans une situation pareille. Elle ne pensait pas à elle-même, mais d'abord à nous toutes. Petit à petit, après un certain temps, nous étions un peu mieux habillées et cela comptait beaucoup au camp. Par la suite, Mala nous a toutes placées dans un commando à l'intérieur. Plus tard, j'ai
rencontré un ancien ami de France, Solomon,
un électricien qui venait travailler au camp de Birkenau.
Par lui, nous avons été mises en rapport avec les Françaises et
d'autres. L'activité de Quant aux filles qui travaillaient dans les usines à munitions, elles nous ont fourni des explosifs. Personnellement, j'avais la responsabilité de cacher une bouteille - elle était indispensable pour soutenir les préparatifs de révolte du Sonderkommando (1). Ce n'était pas facile de la cacher dans les conditions du camp. Voilà qu'en plus, les Allemands effectuaient une fouille systématique des "bloks» à l'occasion de la pendaison de quatre filles de l'Union (nom de la fabrique de munitions) qui avaient été dénoncées - toutes les prisonnières ont dû assister au spectacle. Ne sachant quoi faire, j'ai jeté la bouteille dans l'égout. Mais après, comment la sortir? C'était fort risqué. La nuit, Sarah Goldberg étant de garde, nous avons réussi à la récupérer avec un grand seau, après quelques heures de travail. A la fin de l'année 44 les Allemands ont évacué le camp de Birkenau à Auschwtz. Quelques-unes sont restées: moi avec deux autres filles. Cyporka (de Paris) et Olga (.une Russe). Nous étions désignées par la Résistance pour couper les fils de fer barbelés afin que les gens du Sonderkommando puissent s'évader. Malheureusement, nous n'avons pas eu la moindre occasion d'intervenir car la révolte a échoué. Comme l'Armée Rouge progressait, en janvier, nous avons été évacuées d'Auschwitz. Nous avons marché presque une semaine sans manger ni dormir, dans le froid. Enfin, nous sommes arrivées à Ravensbrück. Pendant tout ce temps, nous nous serrions toujours les coudes. Au bout de quelques semaines, ils nous ont encore mises dans un train et envoyées a Malchow; nous avons été séparées, seulement la moitié du groupe est parvenue a cette destination, nous étions sans nouvelles des autres. La guerre se terminant, les Allemands ne savaient pas quoi faire avec les prisonniers; ils nous ont une fois de plus mises en route, pour Leipzig. Nous avons encore marché pendant quinze jours. Les Allemands étaient encerclés de tous les côtés. Epuisée, manquant de
nourriture, j'ai pris le risque de m'évader. Je suis restée quelques
jours dans les bois, affamée, dans le froid: j'ai alors rencontré des
prisonniers de guerre français. Ils m'ont emmenée dans une ferme
allemande ou ils travaillaient. Après deux ans de disette, j'ai mangé
sans réfléchir et il s'en
est fallu de peu que je meure. Grâce aux prisonniers qui m'ont sauvé la
vie, j ai pu revenir à Bruxelles le 15 mai 1945, parmi les premiers
rescapés.
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Je suis arrivée en Belgique avec mon mari en 1937 et
nous nous sommes installés à Anvers. En mai 40, lors de l'invasion
allemande, nous avons suivi la vague des réfugiés vers le sud de Notre appartement avait été vidé. Le propriétaire belge avait tout donné à «Winter Helf» (Secours d'Hiver), estimant que notre compte chez lui était à découvert. Nous avons dû nous réinstaller dans un autre appartement. A la demande du groupe d'aide philanthropique «Ezra» où étaient représentées toutes les tendances politiques, je suis devenue volontaire dans un refuge pour les démunis, qui s'était ouvert à Anvers. Bientôt, des mesures furent prises contre les Juifs. Lorsque nous avons dû mettre l'étoile jaune, nous l'avons portée avec fierté et beaucoup de Belges, en nous croisant, ôtaient leur chapeau pour nous saluer. Souvent, en raison du couvre-feu, nous restions loger chez des amis pour étudier les événements du jour et la situation dans le monde. Et quand des amis nous ont proposé de les aider à publier des feuillets clandestins, nous avons immédiatement accepte, nous étions heureux d'avoir enfin l'occasion de participer à la lutte contre les nazis. Les journaux étaient cachés dans la voilure de mon bébé, en dessous de lui. Je retirais mon étoile jaune et me rendais aux différentes adresses. Les gens, des Belges pour la plupart, me recevaient avec le sourire, m'offraient une tasse de café, jouaient avec mon fils et prenaient leurs journaux. David, mon mari, et
Max
Katzenelenbogen, notre ami,
sont partis à Charleroi pour travailler à la compagnie des chemins de
fer. En effet, la rumeur courait que ceux qui avaient un travail utile
dans l'administration ne seraient pas déportés. Là, ils ont rencontré
un autre ami, Jos
Isten, qui était en rapport avec Après quelque temps, j'ai confié mon fils à une famille belge, près d'Anvers, j'avais vraiment attendu le dernier moment: bientôt après, les Allemands ont encerclé les quartiers juifs, fouillé maison par maison pour arrêter non seulement les jeunes gens mais des familles entières avec les enfants. Comme Berthe, l'épouse de Max Katzenelenbogen, avait beaucoup d'amis belges, nous logions chaque nuit à une autre adresse. J'ai rejoint La chasse aux Juifs était à son comble mais je ne
pouvais m'empecher de rendre visite à mes amis dans leurs caches. Ils me
demandaient toutes sortes de petits services. La nuit, j'allais voir mon bébé
qui entre-temps avait été placé dans le village de Oelegem. Une famille
de chrétiens belges qui gérait une agence de la poste m'a donné une
chambre où je pouvais loger avec mon fils. Cette famille avait une fille
et trois fils, l'aîné étudiait dans un collège d'Anvers. Ils
m'apprirent que des explosifs abandonnes par les Anglais au cours de la
retraite étaient cachés dans leur cave. Ils acceptèrent de me livrer
les explosifs à condition que je ne révèle pas l'endroit où je les
avais obtenus. A chaque voyage, j'en incitais dans mon sac à main que je
glissais sous la banquette de l'autobus. On recherchait souvent des œufs
et du beurre, et dans ma naïveté, je croyais qu'il suffirait de nier que
ce sac m'appartenait au cas où je serais prise. Puis Louis, l'aîné, m'a
priée de le mettre en contact avec Piet, mon responsable, m'a annoncé un jour qu'il stoppait mon activité car il estimait inutile de mettre en danger ma personne et l'organisation: les Allemands recherchaient activement les Juifs et une partie de la population belge les y aidait. Cependant, je ne pouvais rester inactive et j'ai décidé d'aller à Charleroi avec mon fils retrouver David. Celui-ci continuait à imprimer des journaux clandestins et moi, j'ai rejoint les Partisans Armés, avec l'appui de l'organisation anversoise. A nouveau, je suis devenue la courrière d'un dirigeant; il se présentait sous le nom de «Robert» et m'appelait «Yvette» En juillet 43, j'avais rendez-vous avec lui pour lui
remettre des documents. «Raymond», son remplaçant, l'accompagnait. Il
refusa de recevoir les documents, prétendant qu'il voulait d'abord
connaître les autres membres, les boîtes aux lettres de La veille de la nouvelle rencontre, David apprit l'arrestation de Robert et de sa courrière, Nicole. Ma première réaction fut de ne pas aller au rendez-vous avec Raymond; David trouvait que je devais y aller, pour le prévenir du danger, mais sans emporter les documents. J'étais bien embarrassée; David proposa de contacter Hamek W., P.A. juif, connu pour son courage. Hamek m'ecouta avec attention et m'interdit de rallier le lieu de rendez-vous, où se trouvait précisément la réserve principale des P.A. Mais je tenais absolument à prévenir mon nouveau dirigeant, si bien que nous avons convenu de nous retrouver, Hamek et moi, à l'arrêt du tram. J'ai raté le tram et j'ai décide de m'y rendre à pied. En cours de route, une voiture s'arrête a ma hauteur; «Viens, Yvette», me crie-t-on et déjà des mains m'attrapent. La voiture file. Deux hommes armés en civil, assis à côté de moi, prennent mon sac à main et le remettent à l'homme assis près du chauffeur. Il le fouille. Heureusement, je n'ai pas les documents. Je suis fichue. Tout est fini. Il ne me reste qu'à me taire, me taire, me taire. La voiture s'arrête face au bâtiment de L'interrogatoire continue: «Où habites-tu?». Je réponds que je n'ai pas d'appartement, que je traîne dans les rues. Je me lais ensuite mais je claque des dénis. J'ai froid par tout le corps. Je ne sais que dire pour qu'ils cessent de me frapper et de m'interroger. Puis le chef fait un signe, et les deux hommes me descendent à la cave, dans l'obscurité. Mon visage est gonfle. Ils me frappent a nouveau: «Maintenant, tu parleras, chienne», disent-ils. Une petite fenêtre donne sur la rue. On voit les jambes des passants; au-dessus dans le couloir, des gens sont assis. Je sais que personne ne viendra à mon aide mais je voudrais qu'ils sachent ce qui se passe ici : je crie aussi fort que je peux. Ensuite, les hommes me traînent àl'étage dans une chambre, Raymond s'y trouve, installé dans un fauteuil. Je crois rêver mais c'est bien lui. «Tu le connais?» Je veux prouver à Raymond qu'on peut avoir confiance en moi, et je dis que non. Ils rient et s'adressent à Raymond: «Tu sais qui elle est?», «C'est Yvette, la courrière», répond-il. Tout mon corps me fait mal. Il me semble que je tombe dans un précipice. Mon responsable explique que je devais lui apporter des documents et que l'argent et les bons de ravitaillement étaient pour moi. Je reçois un coup sur la tête. Raymond me dit: «Ils savent tout, Yvette, tu peux parler». Je le regarde et j'essaie de comprendre: il a l'air en forme, pas de traces de coups, ses habits sont en ordre. Il tâche de m'influencer: «C'est inutile de te faire rosser». Je commence à comprendre... «Où sont les documents?» demande calmement le chef
de On m'emmène au sous-sol, où se trouve un corridor avec des cellules sur toute la longueur. On me fait entrer dans l'une d'elles. Avant que la porte ne se referme sur moi, les deux gardes menacent de me pendre par les cheveux si je continue à nier. Heureusement, on m'a laissé mon sac à main; j'y trouve avec soulagement mes petits ciseaux. J'ai les doigts tellement gonflés à cause des coups que je peux à peine tenir les ciseaux ; cependant, je passe toute la nuit à couper mes cheveux. Alors, pour la première fois depuis mon arrestation, je pleure. Je ne pleure pas pour mes cheveux, ni pour la douleur dans toutes les parties de mon corps, mais je pleure de solitude, pour mon petit garçon, pour David qui croyait au «devoir sacré» d'avertir le responsable. Comment vais-je prévenir les autres de la trahison? Ma cellule est absolument vide. Le matin, le gardien m'ouvre la porte; c'est un jeune de dix-sept ans vêtu de l' uniforme rexiste, il est chargé de me conduire aux toilettes. Il a des manières craintives car sur la porte de ma cellule, il est écrit à la craie blanche: "Gfahrliche Teroristen» — dangereuse terroriste. Mes ravisseurs reviennent bientôt et fixent avec étonnement mes cheveux courts. J'explique que je les ai coupés par peur des poux. «De toute façon tu en attraperas», me promet-on. Durant la journée, je reste au sous-sol où arrivent sans cesse de nouveaux prisonniers: des hommes, des femmes et des enfants. Ce sont des Juifs qui ont été pris dans la rue et qui attendent d'être envoyés au camp de concentration de Malines. Tous sont enfermés, ensemble, dans une cellule voisine de la mienne et je les envie. Dans ma solitude, je chante des chants révolutionnaires pour m'encourager et c'est ainsi que mes voisins s'aperçoivent de ma présence. L'un découvre dans le mur une fente qui nous permet de converser. Je lui raconte mon histoire et la trahison de mon responsable et je lui demande de transmettre la nouvelle aux plus de gens possible. Il me jette un crayon et j'écris sur le mur: «Raymond traître». Je décide de tenter d'arriver à Malines afin d'être avec les gens de mon peuple. Chaque fois que j'entends que l'on sort quelqu'un d'une cellule, je frappe à la porte et crie: «Ici aussi, il y a une Juive!» Je crains un second interrogatoire. Apres dix jours d'isolement, mon souhait est exaucé. La porte s'ouvre et avec d'autres Juifs, je suis introduite dans une camionnette gardée par des Allemands armés qui nous mènent à Malines. A Malines, a lieu pour chacun de nous un
enregistrement sévère et une fouille minutieuse afin de déceler les
objets de valeur que nous aurions pu cacher sur nous. Les coups reçus à Au début, les prisonniers me tiennent à l'écart parce qu'ils me soupçonnent d'être infiltrée par les Allemands. C'est alors que je trouve une femme courageuse, Sara Gutfrajnd, qui ose s'adresser à moi. Elle écoute mon histoire et elle me présente au groupe de résistants juifs. Eux aussi, après leur arrestation, ont déclaré être juifs et ont dès lors été envoyés à Malines. Sara s'occupe de moi comme d'un enfant car je ne peux ni me laver ni manger par mes propres moyens. Jour après jour, je suis interrogée par le chef du groupe car mon histoire semble peu claire. Moi aussi, je pense encore que 1'«erreur» peut être découverte et que mes ravisseurs me soumettront encore à des interrogatoires. Entretemps, le camp s'est tellement rempli qu'il n'y a plus de place et la date d'expédition à l'Est se rapproche. On nous permet d'écrire et de demander des colis. Nous recevons des listes d'objets dont nous aurons besoin en déportation. J'écris à mon oncle par l'intermédiaire du Judenrat et je demande, comme tout le monde, des vêtements chauds, des chaussures solides et des conserves. Je fais également allusion à la trahison de Raymond et je m'informe de ma famille. Quand le colis me parvient, j'y trouve un chausson de mon fils et des effets personnels que m'envoient mes amis, signe qu'ils n'ont pas été pris. Aux alentours du jour de départ vers l'Est, je perçois quelque chose de
bizarre au sein de notre groupe de Résistance. Une évasion se prépare
et on me propose d'y participer. Les outils nécessaires sont déjà en
notre possession, ils étaient cachés dans les paquets que nos amis nous
ont envoyés. La liste des partants est préparée par les prisonniers
qui travaillent dans les bureaux. Avec leur aide, la liste est composée
de telle manière que notre groupe au complet peut monter dans un même
wagon. Les trains sortent la nuit afin de cacher à la population locale
les milliers de déportés dans les camps. Mais vu le succès des
évasions précédentes organisées par Les gens de notre groupe prennent place près des parois qui séparent les wagons. Mais les nazis choisissent dans chaque wagon un prisonnier tenu de signaler toute tentative d'évasion au moyen d'un drapeau rouge. Quand nous commençons à scier les parois, l'homme se met à crier et d'autres personnes l'imitent, principalement des femmes et des enfants qui craignent pour leur vie au cas où notre évasion est découverte. Je ne sais pas comment on fait taire le responsable ni comment il se décide finalement à se joindre à nous. Soudain, le train s'immobilise. Sans doute, les nazis savent que de semblables tentatives sont en train de se produire dans les autres wagons. Nous nous dépêchons de replacer les panneaux et les nazis ne remarquent pas le subterfuge; pour la suite du voyage, une sentinelle est placée sur le toit de chaque wagon. C'est ainsi que notre plan de fuite échoue. Pour faire face à la situation qui nous attend à l'Est, nous répartissons les victuailles entre nous et nous nous organisons en groupes de deux ou trois qui essayeront de rester ensemble dans quelque camp qu'ils soient. Je parle à tous de la carte postale que Mala Zimetbaum, la belle-fille de mon oncle, a envoyée du camp où elle est emprisonnée depuis un an déjà. Le contenu de toutes les cartes postales qui arrivaient en Belgique était identique: «Je suis bien, je travaille». Mais Mala avait ajouté la phrase suivante: «Tous les autres se trouvent avec Esther»; or, en fait, Esther était morte bien avant la guerre. Malgré tout, nous ne nous désespérons pas; nous pensons que seuls les malades et les vieillards ne pourront pas tenir le coup mais nous, nous sommes jeunes et en bonne santé et de plus, la fin de la guerre approche. Nous décidons que si on nous sépare, chacun se débrouillera pour trouver Mala et qu'elle sera notre point de ralliement à tous. Nous voyageons trois jours, enfermés dans un fourgon à bestiaux, dans des conditions horribles et nous arrivons à Auschwitz. Brutalement, les wagons plombés sont ouverts. Les SS, avec des cris sauvages, nous ordonnent d'abandonner tous nos bagages et de nous mettre en rang. Après que les femmes et les hommes ont été séparés, les vieillards, les infirmes et les femmes avec des enfants doivent monter dans des camions qui partent avant nous. En rang par cinq, nous sommes conduits au camp. A perte de vue des fils barbelés et des poteaux électriques à haute tension entourent des baraquements. Au loin, on aperçoit une grande cheminée industrielle et nous pensons qu'il s'agit d'une fabrique quelconque. Pour entrer, nous franchissons une enceinte de murs, de grilles et de fils de fer; nous nous arrêtons devant les bureaux de réception où s'opère le classement par matricule. Tout nous a été pris: bijoux, argent et nourriture. On nous tatoue un numéro d'ordre sur le bras gauche. Ensuite, dans le bloc voisin, on nous ordonne de nous déshabiller. On nous coupe les cheveux et nous passons sous une douche glacée. Pendant que nous attendons pour recevoir des vêtements, nous demandons où se trouvent nos familles parties en camion. On nous explique sans ménagement que les cheminées au loin sont des crématoires et qu'on y brûle déjà les cadavres de notre transport. Le choc est terrible, tellement inconcevable, tellement inhumain que nous refusons de le croire. Alors, je comprends la phrase de Mala: «Tous les autres sont avec Esther (morte avant la guerre)». Déprimées, désespérées, nous suivons comme des automates une fille qui nous guide vers les lieux où s'effectue la quarantaine. On nous installe dans une baraque conçue pour cinq cents personnes et où nous sommes entassées à mille dans des conditions indescriptibles, sans eau ni cabinet. Après l'appel du matin, on nous conduit sur une grande place derrière les dernières rangées de blocs. Là, se trouvent des éviers et des latrines qui sont pour la plupart fermées pour rester propres en cas de contrôle. Presque toutes les femmes souffrent de diarrhée et font leurs besoins n'importe où. A cause de cela, nous sommes punies et devons rester à genoux durant des heures avec une brique dans nos mains levées. Pour que le camp garde une apparence de propreté, il
existe un commando de nettoyage. Chaque jour, arrive une Kapo qui choisit
une dizaine de femmes pour leur faire ramasser à mains nues tous les excréments
et autres saletés. Un jour où j'ai été réquisitionnée pour ce
travail, je suis attachée à une charrette, complètement désemparée;
je pleure: après deux semaines de camp, je n'ai pas encore retrouvé Mala. Tirant toujours la charrette, je vois sortir de l'infirmerie des
femmes convalescentes accompagnées d'une courrière. Celle-ci est bien vêtue;
comme les prisonniers fonctionnaires, elle a tous ses cheveux et pas de
foulard. Quand elle passe près de moi, je n'en crois pas mes yeux. Je m
arrête et je crie: «Mala!» J'oublie que je suis rasée et mal vêtue. «Je suis Giza». dis-je. Mala reste figée un instant ci nous tombons dans les bras l'une de l'aune. Elle me demande si les autres membres de la famille sont là. «Non, ils ne sont pas avec moi». Mala me promet qu'on ne se séparera plus désormais. Grâce à elle, le départment des vêtements me procure une robe qui me va, des chaussures ci même un tablier. Mala avait été choisie par les SS pour être «Lauferin», car elle parlait plusieurs langues. Ainsi elle pouvait circuler librement dans toute le camp. Elle utilisait ce privilège pour établir des contacts entre les membres d'une même famille séparés à l'entrée du camp. Elle risquait fréquemment sa vie en transportant des messages et des médicaments, encourageait et aidait le mouvement de Résistance qui commençait à prendre forme. Elle s'attacha spécialement aux malheureux qui venaient de Belgique. Mala essayait toujours d'obtenir les travaux les plus légers pour les femmes affaiblies ou très jeunes afin qu'elles aient une petite chance de survie. Je raconte à Mala que je suis avec des femmes appartenant à un groupe clandestin et que je ne veux pas me séparer d'elles. Je demande si elle peut les aider, elles aussi. Elle me dit que dans le camp de travail existe un groupe de Françaises très solidaires (groupe avec lequel elle nous mettra plus tard en contact). Par son intermédiaire, nous établissons le contact avec des hommes qui passent chaque matin devant le portail où elle se trouve avec d'autres courrières. Après six semaines de quarantaine, beaucoup de nouvelles étaient mortes du typhus et de la dysenterie. On nous déménage alors dans la section B du camp de travail. On nous distribue différents travaux, la plupart à l'extérieur du camp. Je ne voulais pas être la seule du groupe à recevoir un travail facile. Mala réussit après plusieurs interventions à nous attribuer le commando des chaussures, dans une baraque protégée des mauvaises conditions de l'automne et de l'hiver. Mala insiste pour que je me rends dans son bloc chaque soir après l'appel. Là, je fais la connaissance de ses amies courrières et également traductrices, Lea, Herta et Sala. Quand Mala
me confie son projet d'évasion avec Edek
Galinski, je ne suis pas très enthousiaste car le rôle de
Mala dans le
camp est d'une grande importance pour Edek avait raconté à
Mala qu'un groupe de partisans
opérait dans les environs d'Auschwitz; lui-même était en contact avec
un ouvrier et en outre la sœur de son ami Kieler (elle habitait Zakopane)
avait promis son aide. Mala croyait, pour sa part, qu'il était possible
de rejoindre clandestinement Le plan d'Edek est le suivant: il se procurera un uniforme d'officier SS et ainsi déguisé, il conduira son ami prisonnier hors du camp, soi-disant pour un travail extérieur. Il lui faudra pour cela un «passierschein» (un permis spécial). Par son travail, Mala a accès au corps de garde et peut voler un permis. Elle accepte et propose à Edek de s'évader avec lui. L'ami d'Edek n'approuve pas ce plan, il refuse de s'évader avec une femme qui de plus est juive. Mais Edek se rallie au projet de Mala d'alerter le monde, et il décide d'organiser l'évasion plutôt avec elle. Ils se préparent à partir un samedi, jour où la surveillance est moins implacable car certains S.S. quittent le corps de garde. Mala portera un uniforme masculin. En tant que prisonnière fonctionnaire, elle a l'autorisation de laisser pousser ses cheveux, alors que les autres femmes du camp étaient toutes rasées. Cela sera un atout important hors du camp. Mais déguisée en homme, Mala devra cacher ses cheveux dans une casquette et porter une bassine pour dissimuler sa figure. Mala confie son plan à ses amies les plus proches, les trois «lauferin» qui travaillent avec elle. Celles-ci l'assurent de leur aide. Tout est prêt pour le grand jour: le 24 juin 1944. Mala est calme, elle s'attache une ceinture abdominale dans laquelle elle a caché une robe non marquée (sur le dos de tous les vêtements portés par les prisonniers était peinte une épaisse croix rouge qui pouvait se voir de loin et rendait ainsi toute évasion difficile). Je me dirige vers un bloc situé à proximité de celui d'où Mala doit sortir et je guette son départ par une petite fenêtre. Il est midi. Le S.S. de garde s'éloigne du camp en
moto et Mala et une autre «lauferin» entrent au corps de garde. A l'intérieur,
se trouve une femme S.S. Elles la connaissent bien. La «lauferin» engage
la conversation avec Mala quitte le corps de garde, courbée sous le poids de la bassine posée sur sa tête, la figure presqu'entièrement cachée. Edek s'est changé dans une réserve à pommes de terre non loin du corps de garde. Il est bien au courant de la procédure pour l'avoir maintes fois vérifiée lorsqu'il travaillait hors du camp: le prisonnier marche devant, suivi à quelques pas par le S.S. Aussi Edek laisse-t-il Mala le précéder tandis que tous deux marchent vers la sortie du camp. Le plan se déroule comme prévu. C'est un événement exceptionnel que de réussir à s'enfuir d'Auschwitz. La fuite de Mala est découverte lors de l'appel du soir. Toute la région est mise en état d'alerte. Chaque jour, la peur nous tenaille mais au bout d'une ou deux semaines, nous sommes persuadées que l'évasion à réussi. Soudain, comme un coup de tonnerre, la nouvelle tombe que Mala et Edek ont été rattrapés et sont de retour au camp. Le 22 août 1944, au soir, le camp des femmes au complet se retrouve à l'appel pour assister à l'exécution de Mala. La commandante du camp, Frau Mendel, apparaît. Elle lit quelques mots qu'elle a préparés sur une feuille, mais personne ne l'écoute, tout le monde regarde Mala. Mala met la main dans ses cheveux. Tout à coup, elle se tranche le poignet avec une lame de rasoir. Un offi-cicr S.S. remarque qu'il se passe quelque-chose. Il se précipite sur Mala et lui tord le bras. Mala le gifle de toutes ses forces avec son bras ensanglanté. L'officier continue à lui tordre le bras en criant: «Tu veux être une héroïne ! Tu veux le tuer! C'est pour cela que nous sommes là! C'est noire travail». «Assassins» crie Mala. «Bientôt, vous allez payer pour nos souffrances! N'ayez pas peur, mes sœurs! Leur fin est proche. J'en suis sûre. Je le sais, j'ai été en liberté!». L'officier S.S. assène un coup de crosse sur la tête de Mala et la pousse vers l'infirmerie. Deux infirmières arrivent en courant avec un brancard mais la commandante du camp hurle: «Celle-là est pour le crématoire! Elle doit être brûlée vive!» Deux prisonnières apportent une brouette dans laquelle Mala est jetée. Elle voit les larmes qui coulent de leurs yeux. «Ne pleurez pas», leur dit-elle, d'une voix faible, le jour de la délivrance est proche. M'entendez-vous? Souvenez-vous de tout ce qu'ils nous ont fait!». «Ferme la gueule, truie» crie un S.S. «Pendant deux ans, j'ai garde le silence. Maintenant je peux dire ce que je veux», réplique Mala avec ses dernières forces. Un S.S. s'approche d'elle et lui colle un ruban adhésif sur la bouche. «Maintenant elle va se taire», dit-il à Frau Mendel. Et il suit la brouette jusqu'aux crématoires. Longtemps, le camp vécut sous le choc de la mort de Mala. Vers la fin de l'année 1944, les transports de Juifs diminuèrent. Les Allemands commencèrent l'évacuation de Birkenau en expédiant des milliers d'internés à l'intérieur de l'Allemagne. Le bruit du débarquement des Alliés en Europe courait. De temps en temps, nous entendions le grondement des canons: l'Armée Rouge approchait des camps. L'espérance se mêlait à la peur que les S.S. ne liquident le camp à la dernière minute, pour ne pas laisser vivants les témoins de leurs crimes. On prépare une résistance pour empêcher cette éventualité. Les «Sonderkommando» (1) se sachant directement menacés décident d'agir tout de suite. Ils tentent une évasion en faisant d'abord sauter le crématoire. Malheureusement, le soulèvement échoue et les fugitifs sont attrapés et abattus. Quatre ouvrières de l'usine de munitions «Union» sont arrêtées et accusées d'avoir passé aux «Sonderkommando» de la poudre pour faire sauter le crématoire. Le 6 janvier 45, deux semaines avant l'évacuation, nous sommes obligées d'assister à la pendaison de nos quatre camarades: Alla Gartner, Regina Saphirstein, Esther Weissblum et Rosa Robota. Les coups de canons se rapprochent et les S.S, se hâient de brûler les documents. Le 18 janvier, on nous annonce l'évacuation du camp. On nous range par cinq, on nous distribue du pain et nous parlons. Dans cet hiver atroce, nous commençons ce qui par la suite recevra le nom de «marche de la mort». Beaucoup de ceux qui ont survécu au camp ont trouvé la mort pendant cette marche, morts de froid, affamés ou abattus parce qu'ils ne pouvaient plus avancer. Après deux jours à pied dans le neige, on nous fait monter, à Leslau, sur un train à wagons ouverts, qui sert à transporter le charbon. Le voyage dure à peu près six jours, avec des arrêts près de Grosrosen et d'autres camps où on refuse de nous recevoir. De temps en temps, on nous distribue du pain et nous suçons de la neige. Notre convoi est bombardé. A la fin, on arrive à Ravensbrück près de Berlin. On nous loge dans une énorme tente et pour la première fois depuis le départ, nous recevons un peu de soupe tiède. Après une semaine, nous sommes transférées au camp de Malchow et de là, en avril, nous sommes transférées à Leipzig où je travaille dans une usine d'armement. Après un bombardement de l'usine et du camp, on se met de nouveau en route. On nous fait tourner en rond plusieurs jours dans les bois et les champs. Certaines camarades se sont échappées. D'autres ont les pieds en sang, il faut les aider à poursuivre la marche. De loin en loin, on entend le grondement des canons, et des avions américains nous survolent. Les gardiens S.S. semblent désorientés. Ils nous disent: «Vous serez bientôt libérées; le pont qui permet de passer de l'autre côté de la rivière, où se trouvent les Américains, est en réparation.» Nous sommes assises, épuisées, et nous écoutons la canonnade. Au petit matlin éclate un vacarme et des cris. «Hourra! Hourra! Les Russes sont là! » II se produit alors une effusion de joie indescriptible. Les Russes nous jettent des pains entiers de leurs camions. Ils nous disent de retourner dans le village où nous sommes passées le jour précédent et c'est ce que nous faisons. Nous y restons deux semaines avant d'être dirigées vers un centre de rapatriement. De là, on nous envoie dans la zone américaine et enfin en Belgique, à Verviers. Nous sommes aux alentours du 3 juin 1945. Arrivée en Belgique, je vais immédiatement à
Charleroi où je retrouve mon mari David avec ses compagnons
Max
Katzenelenbogen et Jos
Isten à l'adresse où je les avais laissés avant
mon arrestation, chez Julia
Baudelet, chaussée de Bruxelles, 120. Là,
ils ont imprimé la presse clandestine jusqu'à Notre enfant Simon avait été gardé pendant tout ce temps par une famille belge, les Gonsette, Emilie et Alphonse Gonsette avaient accepté de garder un enfant juif pour se venger des Allemands qui avaient déporté leur fils unique Emile. Celui-ci était étudiant à l'Université du Travail et il était membre d'une organisation résistante. Juillet 1990. (1) Groupe travaillant aux fours crématoires (NDRL) |
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Liste des P.A. juifs
cités |
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ABEL, Chaïm |
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Cet ouvrage est édité par «Les
Enfants des Partisans juifs de Belgique» Illustration en couverture de Maurice Pasternak |
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Vincent Dozo, micro-éditeur |
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Abel Chaim Bresler Mordko Cymberknopf Abraham Deutscher Samson Dobrzynski Henri Engielszer Simon Finkelstein Lejbus Goldenberg Joseph Goldgewicht Abraham Gruman Nuhim Gruman Suzama Helfgott Simon Herszaft David Klein Georges Kutnowski Léon Lando Mozes Livschitz Choura Livschitz Georges Livschitz Sroel Lovenvirth Michel Mandelbaum Moïs Potasznik Szmul Pryzant Rosa Rabinowicz Leib Rakower Mosjek Rochman Charles Rozencwajg Maurice Schive Isaias Simon Zoltan Strausz Alexandre Szriftgiser Hirsch Waksman Lejzor Weichman Wolf Weingast Bruno Weiss Sandor |
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Noms mentionés dans le témoignage de |
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Bryfreger-Radinowicz
Lola
Goldberg Sarah Gutfrajnd Jacob Milnowiccky Abel Rabinowicz Dora Rabinowitz Leibke Wajnberg Henri Waksman Léon Wulfowicz Max Zimetbaum Mala |
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Camps
dans le témoignage de |
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Bryfreger-Radinowicz
Lola
Mechelen Auschwitz Birkenau Ravenbrück Malchow |
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